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PROCÉDURE CRIMINELLE

piteusement se complaindre, environ le temps de la Saint Jehan derreine passé eut deux ans ; et, depuis, ne virent ledit enffant ne n’oirent ou il fust. Et dient que, depuis demy an en ça, ilz ont oy dire communement que le sire de Rais et ses gens faisoint prendre et occire des petiz enffants.

Item, dient avoir congnu ung jeune filz enffant de feu Eonnet de Villeblanche, et avoir oy, puis trois mois, la mere dudit enffant se conplaindre de la perdicion ou adirance d’icelui et que, depuis celle conplainte, ne le virent.

Item, Raoulet de Launay, taillandier, deppose que, environ l’Ascenpcion derreine, il fist ung pourpoint a l’enffant dudit de Villeblanche, qui lors demouroit o Poitou, et lequel Poitou, non pas ladite Macée[1], marchanda o lui de lui fere ledit pourpoint, et en eut vignt soulz dudit Poitou ; et depuis ne vit ledit enffant.

De Touscheronde.


6.
Suite de l’enquête.
6 octobre 1440.

Du sixiesme jour d’octobre.

Jehan Estaisse, Michele, femme dudit Estaisse, de la parroaisse de saint Clemens pres Nantes, rescordent, par leurs sermens, ung filz dudit Dagaie, nommé Perrot Dagaie, quel ilz virent demourer par le temps de deux ans ou environ o maistre Gacien Ruis, et, au temps qu’il y ala demourer, povoit bien avoir l’aage de onze ans. Et, apres y avoir demouré par ledit temps de deux ans, vint demourer ovecques sa mere, et fut o elle ung jour ou deux, et y coucha par une nuyt, a la savance de ces tesmoins. Et, depuis celles heures et environ de la Toussains prochain venant aura deux ans, aperceut la mere dudit enffant et ces tesmoins et pluseurs des voisins d’ilec emurant[2] l’adirance dudit enffant : et oncques puis ne fut veu a la savance de ces tesmoins en ladite parroaisse, ne ailleurs : et avoir plusieurs foiz oy que la mere dudit enffant faisoit demande de sondit enffent audit maistre Gacien, a ses gens et a ung nommé Linaches[3],

  1. La femme sans doute d’Eonnet de Villeblanche.
  2. Nous avons, plus haut, dans un sens analogue, rencontré le mot esmoiant. Mais ici le mot émurant paraît devoir plutôt se rapporter au verbe s’esmuir, qui comporte surtout une idée d’épouvante.
  3. Lenano de Ceva.