Page:Bossard - Gilles de Rais dit Barbe-Bleue, 1886.djvu/49

Cette page a été validée par deux contributeurs.

droit de se faire écouter à la cour de Bretagne ; son grand âge et son patriotisme enfin lui assuraient, plus qu’à tout autre, celui de parler au nom de la raison et de la patrie. Le 23 mars 1425, accompagné du sire de Trèves[1] et de plusieurs autres seigneurs, il partit pour la Bretagne, chargé par le roi de représenter au duc « qu’il avait mis hors ceux dont il avait fait mention, et qu’ils s’en étaient partis et allez, en luy requerrant qu’il luy voulust ayder[2]. » Les conditions de Jean V, pour faire la paix, n’étaient autres que celles du duc de Bourgogne : il avait demandé l’expulsion de ses ennemis hors la cour de Charles VII. Le roi y consentait ; il répudiait, d’ailleurs, toute complicité dans la révolte des Penthièvres ; car il faisait savoir au duc, en même temps, « qu’il avait mis et fait mettre hors de sa maison ceux qui avaient cause de sa prise[3]. » Richemont, enfin, était en faveur, et l’épée de connétable, qu’il portait dans ses mains, paraissait devoir défendre le duc contre tous les envieux : le roi de France ne pouvait montrer plus d’esprit de conciliation. Un grand conseil fut assemblé dans la ville de Nantes, et Gilles de Rais y vint, avec une foule d’autres seigneurs, apporter à son aïeul l’appui de son courage, de ses services et de sa parole. Toute l’assemblée se prononça pour l’alliance française, et une entrevue de Charles VII et du duc de Bretagne fut fixée à Saumur pour le commencement de septembre[4]. Elle eut lieu, en effet, le 8 de ce mois ; la paix fut signée à la grande joie de tous les vrais Français.

Le jeune baron de Rais avait accompagné à Saumur le duc de Bretagne. Quel que soit le motif qui ait inspiré dans ces circonstances Jean de Craon et son petit-fils, patriotisme ou ambition, ou ambition et patriotisme à la fois, il est certain qu’ils embrassèrent le parti du roi avec ardeur. Le

  1. En Anjou.
  2. Cousinot de Montreuil, Chron. de la Pucelle, Ed. Elz., p. 236.
  3. Alain Chartier, Troubles sous Charles VII, p. 53. Ed. MDXCIII, Nevers, Pierre Roussin, imprimeur des ducs de Nevers.
  4. Alain Chartier, ibid.