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GILLES DE RAIS, BARBE-BLEUE.

d’analogie ? Des deux côtés les dissemblances sont les mêmes : seulement il n’y a que les érudits qui aient imaginé des rapprochements entre l’histoire de sainte Triphine et le conte de Barbe-Bleue, au lieu que l’étroite liaison, qui existe entre Barbe-Bleue et Gilles de Rais, vient du peuple et se trouve en lui.

Quant à penser que Charles Perrault s’est inspiré de cette légende à la vue des fresques de la chapelle Saint-Nicolas, « qui n’étaient peut-être pas alors badigeonnées[1] », faudrait-il s’y arrêter si ces peintures étaient postérieures au conte et même au conteur ? Or, à n’en pas douter, c’est ce qui existe. Que l’on fasse, en effet, attention au peu de certitude de M. A. Guéraud, qui fait remonter ces fresques « au xiiie ou xve siècle, dit-on. » Il n’en est donc pas très sûr ; et celui qui hésite entre le xiiie et le xve siècle n’a peut-être pas beaucoup de raisons de choisir entre le xve et le xvie siècle. Mais, comme il veut éliminer à tout prix l’opinion qui fait de Gilles de Rais le type de Barbe-Bleue, il a soin de rejeter ces peintures jusqu’au xve siècle au moins. Encore convient-il de remarquer que Gilles vécut dans la première moitié de ce siècle ; et rien n’assure que M. A. Guéraud et ses partisans n’aient pas entendu parler de la seconde. Cela suffirait pour ruiner le raisonnement qu’ils prétendent bâtir sur ce fondement peu solide. Aussi bien avaient-ils grandement raison d’hésiter. Car, ceux qui, avec M. Charles Deulin, n’ont pas à cœur, pour le besoin de leur cause, de faire remonter si loin les fresques de Saint-Nicolas, ne font point de difficultés de les ramener jusqu’au xviiie siècle, et les dernières recherches des archéologues leur ont donné raison. M. Rosenweig nous dit « que le lambris de la chapelle Sainte-Triphine, dont les peintures représentent, en plusieurs tableaux, accompagnés de légendes, la vie de cette sainte, fut exécuté en 1704[2]. » Soutenir que Charles Perrault a puisé,

  1. Ar. Guéraud. l. c.
  2. Statistiques archéologiques de l’arrondissement de Pontivy ; article : Napoléonville. — Assertion communiquée par l’auteur.