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SES AVEUX.

par un des greffiers de la cour ecclésiastique, nommé Jean Petit, auquel nous devons la relation qui en fut faite au tribunal de l’Église ; et le président de Bretagne, par Jean de Touscheronde, qui nous a laissé la relation du procès civil. En leur compagnie étaient encore, Yvon de Roscerff, écuyer de Jean Labbé, le capitaine breton qui avait arrêté le maréchal de Rais à Machecoul ; Robert d’Espinay, Robert de la Rivière, Jean de Vennes et plusieurs autres personnages appelés pour servir de témoins. La chambre qu’habitait Gilles était située, comme nous l’avons dit, dans la partie supérieure du château de la Tour-Neuve et aménagée avec le luxe qui convenait pour un si grand personnage. Dans une pièce voisine, la torture était préparée, mais cachée aux regards du maréchal. Lorsque tout le monde fut introduit, Gilles prit la parole et, librement, sans ombre même de violence ou de menace, il entra de lui-même dans le récit de ses crimes.

Le président de Bretagne l’interrogea d’abord sur l’enlèvement et le meurtre des enfants ; sur les crimes qu’il avait commis avec eux et les détails de la mort qu’il leur faisait subir ; enfin sur les évocations des démons, les offrandes, les promesses et les sacrifices sanglants offerts en leur honneur. Le baron, visiblement rempli de douleur, avoua à Pierre de l’Hospital et aux autres assistants qu’il avait commis tous les crimes dont on parlait : « Où et depuis combien de temps avez-vous commencé ? » lui demandèrent l’évêque et le président de Bretagne. — « Au château de Champtocé, dit Gilles, mais j’ignore depuis combien de temps : ce que je sais du moins, c’est que j’ai commencé l’année où mourut mon aïeul Pierre de Craon, seigneur de la Suze. » — « Et qui vous donna l’idée de commettre ces crimes ? » demanda Pierre de l’Hospital. « Personne, répondit Gilles ; mon imagination seule m’y a poussé : la pensée ne m’en est venue que de moi-même, de mes rêveries, de mes plaisirs journaliers et de mon goût pour la débauche : je n’ai jamais eu en tout cela que l’intention d’assouvir mes désirs. » Et comme