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GILLES DE RAIS.

fices, rien n’est plus faux. Pour tout dire, à la vérité, j’ai bien reçu autrefois, à Angers, d’un soldat jeté en prison pour cause d’hérésie, un livre qui traitait de l’alchimie et de l’évocation des démons ; plus que cela, je l’ai lu à plusieurs reprises et je l’ai fait connaître à plusieurs personnes d’Angers ; j’ai même eu avec ce soldat plusieurs entretiens sur l’alchimie et sur l’évocation des démons : mais tout s’est borné là ; quelques jours après, je lui ai remis le livre que je lui avais emprunté. » Ainsi, l’attente des juges et de la foule est encore une fois trompée : tout ce qui est de nature à ne pas le faire juger coupable et condamner sévèrement, et ses tentatives d’opérations alchimiques, et ses déceptions, et ses espérances toujours vivantes, Gilles avoue toutes choses : quant au reste, qui constitue véritablement l’accusation et le crime, il nie qu’il soit véritable : « Non, je n’ai jamais évoqué le démon, affirme-t-il, et si, par ses témoins, aux dépositions desquels je déclare ajouter foi et m’en rapporter, mon accusateur peut prouver que j’ai ou invoqué moi-même ou fait invoquer par d’autres les malins esprits, que j’ai fait ou fait faire avec eux un pacte quelconque, que je leur ai offert ou fait offrir des sacrifices et des oblations, eh bien ! dans ce cas, je m’offre à être brûlé vif ! » Défi superbe ! L’imprudent ! il croit, il espère encore qu’il pourra tromper ses juges : il compte sur les dénégations de ses complices. « Vous pouvez, dit-il en effet au promoteur, vous pouvez produire contre moi tous les témoins que bon vous semblera ; vous pouvez les interroger sur les différents chefs de l’accusation et sur toute autre chose que vous voudrez : je reconnais d’avance toute la valeur de leurs dépositions. » Graves engagements, bientôt suivis d’amères déceptions.

Un grand point cependant était acquis : Gilles reconnaissait l’autorité de ses juges ; on allait procéder sans retard à l’audition des témoins. Mais avant, le promoteur demande qu’ils soient admis, Gilles et lui, à prêter serment sur les saints Évangiles, et les juges le lui accordent. Ils s’avancent donc l’un après l’autre, l’accusateur et l’accusé, et font entre les