interrogateur de la jeune femme ; bien aimer, c’est bien choisir.
Cécile baissa les yeux, et pendant ce simple mouvement, sa pensée sans doute fit un long détour, car sa réponse fut une de ces déviations illogiques de la conversation, qui sont si habituelles aux femmes.
— Qu’Adrienne est heureuse ! dit-elle, elle a trouvé l’amour dans le devoir.
— L’amour, j’en doute, dit Félicien ; mais est-il absolument indispensable à la vie ? une affection d’une autre espèce ne peut-elle le remplacer ? Entre époux, l’amour, c’est une haute estime ou une profonde confiance ou un vif entraînement de tendresse. Les sentiments que nous avons, Adrienne et moi, l’un pour l’autre, ont un élan plus modéré. Notre accord est sincère, je l’espère au moins, mais il laisse à chacun de nous la libre disposition de soi-même ; nous ne nous livrons point sans réserve. Peut-être cela vaut-il mieux : c’est une épreuve dont je ne connais pas encore le résultat. Je crois cependant qu’à trop s’absorber dans l’intimité du mariage, on perd toujours quelque chose de sa puissance et de sa personnalité.