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CHAPITRE XVIII.

affliction, s’imaginèrent qu’ils pourraient lui procurer quelque soulagement en lui apportant l’objet qu’elle avait paru désirer, et ils se dirent entr’eux : « Cherchons quelqu’un qui puisse nous aider, et demain nous transporterons ici ce tronc qui est dans le Champ du Figuier. » Leurs paroles arrivèrent jusqu’à l’oreille de Merca qui répondit avec un découragement plaintif : « Votre père, malgré toute son industrie et les efforts qu’il y a employés, n’a pu parvenir seulement à déranger cet arbre mort. Ainsi, ce serait vous fatiguer en vain que de tenter une entreprise qui lui a si mal réussi.

L’étranger, à son tour, prêta attention à la conversation de la mère et des enfants, et il se prit à les interroger sur la pesanteur extraordinaire de cet arbre, et, de plus, voulut savoir pourquoi le lieu où il se trouvait s’appelait le Champ du Figuier. Merca s’empressa de satisfaire à ces questions. L’étranger admira le récit de la sainte femme, et reprit ensuite : « J’irai demain avec vos enfants au Champ du Figuier, nous chargerons le tronc sur un chariot, et, si Dieu le permet, nous l’apporterons dans votre maison. Si le chariot vient à fléchir ou qu’il s’arrête en route, du moins ce bois miraculeux, qui porte l’abondance avec lui, étant plus près de votre habitation, déversera sur vos terres une plus grande fertilité. »

L’étranger et les fils de Merca, accompagnés des serviteurs de la maison, accomplirent, dès le lendemain au matin, ce qu’ils avaient projeté, c’est-à-dire qu’ils se dirigèrent à l’endroit où le figuier était demeuré gisant à terre. Cette énorme pièce de bois, qui avait résisté à tous les efforts de Bozo, l’étranger la souleva de terre sans difficulté, et la posa sur le chariot qui avait été préparé pour la recevoir. Les bœufs attelés au chariot parvinrent à le traîner jusqu’au lieu qui a servi depuis, d’emplacement à l’abbaye de Fécamp ; mais, une fois arrivés là, il leur fut impossible de passer outre ; le chariot se brisa en éclats, sous la pesanteur de l’arbre augmentée d’une manière prodigieuse. L’hôte de Merca, interprétant aussitôt cette manifestation de la volonté divine, se prosterna contre terre et