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LÉGENDES RELIGIEUSES.

de temps. Il érigea un nouveau monastère à Montivilliers, village du pays de Caux ; puis il retourna mourir à Noirmoutiers, dans la solitude qui lui avait été hospitalière au temps de ses disgrâces. Sa mort arriva le 20 août 684 ; il était âgé de soixante-huit ans[1].

C’est sous le gouvernement de saint Philibert, et pendant l’époque où il habitait encore Jumiéges, que la plupart des auteurs ont placé l’existence d’un fait semi-historique, qui a acquis une grande popularité en Normandie, sous la dénomination de Légende des Énervés.

Voici, d’après les textes originaux, l’analyse de cette légende[2]. On se convaincra, par une lecture attentive, qu’elle offrait assez de points controversables pour mériter d’être mise, comme elle l’a été, au rang des fables, par nos plus sérieux historiens.

Clovis II avait succédé fort jeune à la couronne de France. Quelque temps après son avènement, sur les représentations de ses sujets, et, particulièrement, des seigneurs de sa cour, il se décida à contracter la sainte union du mariage. Il choisit pour épouse une très belle et très vertueuse fille, d’origine saxonne, nommée Bathilde, ou Bauteuch, et en eut cinq enfants, dont les deux aînés étaient réservés à des aventures mémorables.

Au milieu du bonheur dont il jouissait auprès de la vertueuse Bathilde, une pieuse inspiration suggéra au roi le

  1. Deshayes, Histoire de Jumiéges, p. 4 et suivantes. — Trigan, Histoire ecclésiastique de la Normandie, t. I.
  2. La Vie et Légende de nostre bonne et glorieuse mère, Madame sainte Baultheur Royne de France ; extrait d’un manuscrit de la Bibliothèque royale, provenant du fonds de Cangé, imprimé d’après une copie de M. Floquet. — Miracle de Nostre Dame et de sainte Bautheuch, copié sur un manuscrit du xive siècle, de la Bibliothèque du Roi, par M. Jubinal, revu par M. Leroux de Lincy. — Ces deux intéressants manuscrits ont été publiés, pour la première fois, par M. Frère, libraire-éditeur, à la suite de l’Essai sur les Énervés de Jumiéges, par E.-H. Langlois, Rouen, 1838.