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ANIMAUX FABULEUX.

à leur rencontre pendant tout le jour, et c’est seulement quand la nuit est venue, qu’il se hasarde à sortir de sa triste cachette[1].

Maintenant, le méchant enfant qui tuerait un roitelet, ou qui lui déroberait son nid, appellerait, sur sa propre maison, le feu du ciel. Peut-être à son tour, en punition de son méfait, resterait-il orphelin et sans abri.

Mais la chaumière qui offre sous son toit, ou entre les pans lézardés de ses murailles, une retraite discrète et hospitalière à la petite poulette au Bon-Dieu, voit se renouveler, chaque année, un miracle de bénédiction. Le jour des Rois, tandis que des danses animées se forment autour de ces gerbes flamboyantes que les villageois nomment des feux de joie, ou qu’un festin plantureux rassemble la famille auprès du foyer paternel, le roitelet, sa femelle et leurs petits de l’année, pour s’associer à cette fête domestique, se réunissent dans le nid qu’ils ont habité durant la saison de la couvée. Leur visite, en ce jour, assure, dit-on, aux personnes de la maison, un avenir de prospérité et de concorde.

Il est encore une autre superstition, relative aux animaux, qui glorifie naïvement une commémoration religieuse. On prétend que, la nuit de Noël, les bœufs, les vaches, les chevaux, les ânes, tous les commensaux des étables et des écuries, sont gratifiés du don de la parole ; ils s’entretiennent gravement des devoirs de leur condition, et se plaignent ou s’applaudissent du traitement de leurs maîtres. Un miracle aussi étrange ne se produit point devant les personnes dont la conscience est surchargée de quelque péché mortel ; c’est pourquoi il est regardé comme un moyen d’épreuve, à l’usage des maîtres, pour s’assurer de la fidélité de leurs serviteurs[2]. En d’autres cantons, on dit que les animaux se mettent à genoux pendant la consécration de la messe de minuit. À ce

  1. L’Artiste, 3e série, t. II, p. 300.
  2. Pluquet, Contes popul. de l’arrond. de Bayeux, p. 38. — Mémoires de l’Acad, celt., t. IV, p. 94.