Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/345

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
333
CHARLOT S’AMUSE

perdition continue et croissante de ses forces, au bout desquels, un matin, il expirerait sans souffrir, ainsi qu’une plante à bout de sève ou qu’une lampe n’ayant plus d’huile. Il voulait s’éteindre et non agoniser dans des horreurs. C’est alors qu’un lamentable espoir lui vint. Il trouva une brochure « à l’usage des pères de famille », dont l’auteur concluait en affirmant que le vice solitaire, quand il ne menait pas à une mort affreuse, conduisait inévitablement à la folie ou au suicide. Il rumina cette phrase plusieurs fois.

Fou, il ne le deviendrait jamais. Lors du viol de Marguerite, il commençait à l’être, mais sa cohabitation de dix mois avec Fanny avait changé le cours de son mal. Restait le suicide. Il s’expliquait à présent ses mélancolies dernières, ses souhaits vagues de se débarrasser de la vie. C’était cela. Rémy, au cours d’une de leurs conversations, lui avait d’ailleurs appris que le gazier avait songé à se pendre en découvrant la conduite de sa femme, et qu’il l’aurait fait tôt ou tard sans sa naissance à lui, Charlot. Et le malheureux songeait encore à ce qu’avait dit le professeur Charcot en montrant la veuve. Le savant expliquait par l’hérédité l’hystérie incurable du sujet : « Le père de cette malade, disait-il, était alcoolique, et sa mère s’était