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CHARLOT S’AMUSE

avec des ratures, des hésitations, des phrases inachevées ; il ne fallait pas qu’il lui en voulût, mais c’était plus fort qu’elle. Elle l’aimait bien, seulement, il lui fallait une autre vie… Elle avait essayé de lutter, ç’avait été inutile : elle s’ennuyait…

Alors, il eut des regrets douloureusement amers. Comment n’y avait-il pas pensé plus tôt ? Même pour une femme sensuelle, l’amour n’est pas tout. Il aurait dû la distraire, la promener. À peine étaient-ils sortis dix fois ensemble dans ces dix mois. Encore un coup, il était puni par sa faute. Éternellement, il serait maladroit et bête. Il s’arrachait les cheveux, furieux contre lui-même. Puis, de nouveau, il songea à la retrouver : il lui proposerait une autre vie, il la prierait de faire ses conditions. Au fond, il se reprochait de ne pas l’avoir épousée, cela lui aurait donné des droits.

Et il recommença ses recherches, du Château-Rouge à la Reine-Blanche, fouillant tous les endroits où il espérait la revoir. Enfin, un soir, il l’aperçut, sous un bosquet, lampant du vin à la française avec un jeune homme à cravate rose, joli et bien peigné. Charlot s’avança sans se faire voir et reconnut l’ancien amant de Fanny, celui dont elle avait toujours conservé le portrait. Sans doute, il était sorti depuis peu