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CHARLOT S’AMUSE

bre appréhension. Au lieu de la condamnation qu’il craignait d’y découvrir, il y puisait un rassurant espoir. Son visage blême s’éclaira, et il avala ses drogues amères sans grimace, avide à présent de guérir. Le lendemain matin, il eut un autre bonheur. Parmi les aides-médecins de service dans la salle, il retrouva un ancien condisciple, le fils du docteur Jolly. Celui-ci n’avait point de sotte fierté. Il serra la main du soldat, son ancien camarade de collége, et le recommanda à son chef de service. Charlot dès lors fut gâté, même de la sœur.

Il allait mieux et, depuis cinq jours déjà, il était à l’hôpital, quand, l’oisiveté aidant, ses rêves le reprirent. Il ne voulait pas céder, laissant seulement vagabonder son imagination et rêvassant continuellement les yeux ouverts.

C’étaient des femmes extraordinaires, des orgies surhumaines, toute une débauche artificiellement vécue durant des journées entières. Peu à peu, il en venait, dans ses malsaines songeries, à trouver banale et froide la possession qui en formait le dénouement. Il voulait mieux, il raffinait son plaisir imaginaire et cherchait sans cesse un perfectionnement qui pût satisfaire son esprit, car, ainsi que tous les hommes de son tempérament condamnés au célibat, Charlot, qui connaissait à peine la femme,