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CHARLOT S’AMUSE

« pays », et se donnait un accent faubourien. Tout en parlant, elle l’avait pris à la taille et cherchait à réveiller ses désirs.

— Ce diable de Bébé qui la encore !

Des rires la rempoignaient. L’idée que ce grand garçon pâle, que ce troupier était vierge, l’amusait.

Charlot avait fermé les yeux, sentant monter à son cerveau l’ivresse alcoolique contenue jusque-là. Il ne voulait plus voir, d’ailleurs, cette chambre odieuse, ces banalités écœurantes, cette femme nue. Et, avec un sourire de pitié, il pensait aux folies que certains de ses camarades commettaient pour de pareilles créatures, au mal qu’ils se donnaient pour réunir quelques sous et venir se vautrer près d’elles, sur un sopha crasseux, dans un cabinet puant le renfermé et les eaux de toilette. Il se reportait alors aux douces heures qu’il passait la nuit, en faction : son plaisir solitaire avait un cadre sublime, au moins ! Et songeant à l’influence que la femme exerce sur tant de millions d’hommes, il s’étonnait, se sentant vaguement supérieur à l’humanité.

Tout à coup, le malheureux détraqué cessa de philosopher et rouvrit les paupières. La main de Camélia courait sur son corps. Brusquement, elle se fixa, et Charlot, stupéfait,