Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/138

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
126
CHARLOT S’AMUSE

entendre le silencieux langage des objets. Il revit dans une rapide évocation, la rue fangeuse, les devantures bien connues, les murailles lépreuses de l’hôpital, le quai fermant la rue avec les tas de bois du chantier du Grand I vert, les hautes cheminées profilant leur rougeur grêle sur le ciel : tout ce coin de quartier longuement contemplé de la porte de l’école, quand il attendait avec sa mère qu’on vînt leur ouvrir.

Sur son chemin, il rencontra Eusèbe et Sulpice. Les deux hommes, l’air content de le revoir, l’embrassèrent affectueusement :

— Tiens ! voilà notre Bébé !

Ils lui pinçaient les oreilles, lui tapotaient les joues. Charlot se laissait faire, l’œil défiant, repris de rancune. Le pauvre petit trouvait froids ces baisers qui n’étaient plus que chastes, mais auxquels on ne l’avait point accoutumé, et, le cœur gros, soupirait, se disant qu’on ne l’aimait plus du tout.

— Où est donc frère Origène ? demanda-t-il.

La figure des deux ignorantins se rembrunit. Ils balbutièrent, mais le gamin insista.

— Eh bien ! il est malade, répondit Eusèbe, seulement frère Hilarion a défendu que tu ailles le voir.

Charlot pâlit, douloureusement affecté. Un