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CHARLOT S’AMUSE

dormaient silencieusement. De pâles lueurs de veilleuse jaunissaient leurs vitres et il n’y avait de vivant dans l’enceinte que le petit pavillon du concierge avec ses fenêtres largement éclairées. Par instants, un point lumineux, après lequel courait une ombre, rasait le sol comme un ver-luisant, s’éclipsant derrière les arbres et les corbeilles de fleurs et resurgissant quelques pas plus loin avec des crochets et des balancements réguliers. C’était une sœur ou un infirmier de ronde qui passait, sa lanterne à la main. La lumière soufflée, la nuit du jardin semblait plus noire. Une fraîcheur cependant montait des arbres, portant un parfum de lilas qui franchissait la rue avec la brise et venait embaumer la chambre de Charlot.

— Oh ! que ça sent bon ! faisait l’enfant enthousiasmé de cette belle nuit dont la splendeur, inouïe sous le ciel parisien, lui entrait au cœur comme une jouissance nouvelle, très douce, ainsi qu’il avait rêvé d’en goûter dans de lointains voyages, lorsque, pour la première fois, il avait dévoré le Robinson suisse.

La chaussée était silencieuse et le gamin assis sur les genoux du frère ne découvrait de sa place que le sillon jaunâtre tracé par la réverbération des becs de gaz sur les murs de