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personnalités révolutionnaires ; elle sera la voix des sociétés démocratiques de l’avenir comme elle fut celle des sociétés aristocratiques du passé. » C’est dans la musique que, souvent, aux époques inquiètes, l’humanité a mis son besoin éternel de bonheur. L’art ne meurt pas. « La lumière ne cesse pas de brûler ; seulement elle se déplace, elle va d’un art à l’autre comme d’un peuple à l’autre. » Aussi l’on ne peut isoler un art sans constater aussitôt des silences et des arrêts de vie. Les arts influent les uns sur les autres ; ils se pénètrent mutuellement ou ils en arrivent à se prolonger hors de leurs limites dans celles de l’art voisin. C’est une des idées qui sont le plus chères à R. Rolland et qu’il s’est efforcé, à maintes reprises, d’exposer et de justifier, dans ses cours en Sorbonne ou ses conférences de l’École des Hautes Études Sociales :[1] montrer l’histoire des rapports de la musique avec la vie intellectuelle et morale d’un peuple, faire en somme l’histoire comparée des arts et de la littérature. De ses cours naîtront, peu à peu, d’importants articles de revues ou même des livres, comme celui sur Haendel, ce génial improvisateur dont toute la musique « est vraiment conçue pour tout un peuple et non pour une élite de dilettantes » (p. 233).


Jean-Christophe (1904-1912)


C’est toujours la musique qui dirige sa vie ; elle lui a prodigué ses premières joies d’enfant, elle l’a aidé à nouer ses durables amitiés, elle lui a offert, jeune professeur, le sujet de sa thèse de doctorat, elle l’a sauvé de

  1. Cf. Bibliographie n° 91 et la liste des cours professés par R. R. à l’École des Hautes Études Sociales.