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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

forme. La résistance de Paris fait du bien au moral de chacun ; on n’osait y compter, et voilà que cela donne du temps pour s’armer et s’aguerrir. On en revient à dire que tout espoir n’est pas perdu… Si seulement la France veut se lever, l’Est se révolter et Paris sortir… Seulement !…

Il y a décidément une armée dans cette Sologne et elle n’a pas autant de fiévreux qu’on le pourrait croire d’après la réputation du pays. On parle d’un chiffre respectable de troupes derrière le Beuvron, et nous aimons à penser que ces soldats-là valent mieux que nous, car il paraît qu’ils campent depuis le commencement du mois et qu’ils sont fréquemment exercés.

Mon père, dont j’ai, par ballon, une lettre du 15, me dit que les progrès des mobiles et de la garde nationale sont merveilleux. Il nous souhaite de faire aussi bien. Pauvre père ! il essaye de me rassurer sur ses privations, mais en disant : « La suspension de la vie de famille est la seule souffrance de ce siége, » il laisse voir combien est vive pour lui cette souffrance-là. Il se désespère de n’avoir aucune nouvelle d’aucun de nous. La veille, il avait passé sa soirée rue de Londres, chez les A.-A. et y avait vu le colonel Lindsay donner à M. H.-M. des nouvelles de sa femme réfugiée en Angleterre. Mon pauvre père en avait senti plus vivement l’angoisse de ne rien savoir, aussi me recommande-t-il de profiter de toutes les