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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

maman si cela n’allait pas tuer papa et Maurice, tout ce canon ?

J’ai grondé Marguerite, mais sa question me reste toujours présente et me serre le cœur.

Frère André, frère André ! sois prudent, soigne-toi bien ! nous sommes bien malheureux ici, vois-tu ? et il nous faut de bonnes nouvelles de toi.

Berthe à André de Vineuil.
Les Platanes, 24 octobre.

Encore un courrier, et rien de toi ! rien même de ma tante de Thieulin ! Il semble que notre vie se rétrécisse et se restreigne chaque jour davantage.

Les lettres de Paris, par ballon, sont les seules qui nous arrivent, souvent décachetées, hélas ! Du reste de l’univers nous ne savons que ce que nous apprennent quelques journaux que nos amis réfugiés en Angleterre sont assez bons pour nous envoyer. Quand l’un de ces précieux paquets est annoncé, quelle émotion ! Maman et moi le dévorons d’abord, sautant de l’Armée de la Loire aux Nouvelles du siège, puis un mot d’ordre court dans le village : « Mademoiselle lira les journaux ce soir, » — et dès que la nuit est arri-