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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

fragment de lettre ne nous a été communiqué. Cependant nous croyons devoir à ceux dont l’intérêt nous a suivis jusqu’ici de compléter par un mot le récit qui se dégage des lettres précédentes.

On voulut attendre, pour rapporter dans le caveau de famille les restes de Maurice, que son père et son frère pussent être libérés de leurs devoirs militaires. Les préliminaires de la paix furent signés le 3 mars, et les odieuses conditions qu’on subissait frappèrent comme d’un second deuil la famille dont les débris allaient se réunir aux Platanes.

Le 10 avril fut choisi pour l’inhumation.

C’était un de ces jours splendides qui, succédant aux exceptionnelles rigueurs du dernier hiver, alors que toute lutte avait cessé, ajoutaient pour les vaincus un regret à tant d’autres, et faisaient remarquer à quelques-uns que Dieu semblait n’avoir voulu atténuer en aucune façon les souffrances auxquelles les peuples s’étaient condamnés par la guerre.

Le convoi quitta les Platanes vers midi. Tous les proches parents étaient présents, mais plusieurs intimes amis des de Vineuil avaient été retenus bien loin, soit par la difficulté des voyages en ce temps-là, soit par des deuils semblables au leur. La population des environs les remplaçait. Personne ne restait dans aucune des maisons du petit village quand le cortège en sortit ; et de Montlévêque, de Montépilloy, de Thiers et même de Barberie, les fermiers et les paysans avaient