Page:Boissonnas, Une famille pendant la guerre, 1873.djvu/123

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

107
UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

voilà qu’il faut les reprendre plus sévères que jamais, et jusqu’à quand ?

On se perd en conjectures sur la cause de l’obstination de la Prusse à maintenir une clause aussi évidemment inacceptable.

Les uns disent que la capitulation de l’armée de Bazaine, en rendant impossible la délivrance par le dehors a augmenté du même coup les prétentions de Bismarck et qu’il a introduit cette clause pour rompre les négociations sans endosser l’odieux d’un refus tout net de traiter ; d’autres jurent que c’est l’émeute du 31 octobre qui a donné au chancelier prussien l’espérance de voir Paris s’ouvrir de lui-même avant peu et se livrer à lui par crainte du désordre.

Quoiqu’il en soit, rien ne pouvait être plus habile au point de vue prussien, et plus fatal pour nous que cette espérance donnée et reprise. Si les premières ouvertures ont été faites par déférence pour les scrupules de l’Europe, sa tiède amitié n’aura servi qu’à préparer un piège où nous pouvons périr. L’esprit guerrier aura peine à se ranimer ; on s’est amolli, je ne le sais que trop par moi-même, dans la vision délicieuse du retour des siens, on a caressé des images trop chères, on a trop bien cru être au bout de l’effort, on a regardé derrière soi pour admirer sa résistance : près de cinquante jours de siége, qui l’eût attendu de Paris ? Chacun a compté qu’il avait fait tout ce