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Un Vaincu.

avant de se hasarder dans le gouffre, et cette hésitation leur fut fatale. Au moment où leur artillerie réservait son feu pour les laisser libres d’avancer, l’artillerie sudiste couvrit de projectiles leur masse flottante. Ce fut un affreux désordre. Effrayés d’avancer, effrayés de reculer, les régiments, au nombre desquels on comptait un corps de nègres, se débandèrent éperdus. Les uns fuyaient, d’autres se jetaient dans le fossé, le canon les poursuivait sans merci. Pas un seul ennemi n’atteignit la brèche fumante et quatre mille cadavres couvrirent les pentes du fatal ravin[1].

Cette affaire fut, à peu près, la dernière de la saison. Pétersburg n’eut pas à souffrir une nouvelle attaque, mais tous les efforts de Lee pour rompre ou pour élargir le cercle que formaient autour de lui les armées ennemies, restè-

  1. On raconte que le général Mahone, qui commandait l’artillerie sudiste, voyant les malheureux assaillants incapables de sortir du ravin où il était trop aisé de les foudroyer, ordonna de cesser le feu. « Ce carnage, dit-il, fait mal au cœur. » (Popular Life of Gen. Lee, by Miss Emily Mason.)