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Un Vaincu.

Elle avait acheté bien cher son salut.

Si vingt-cinq mille Fédéraux jonchaient le terrain calciné de Chancellorsville, la petite armée virginienne comptait douze mille hommes tués ou blessés, et parmi eux, Stonewall Jackson ! — « Toute victoire, ainsi que l’écrivit le général Lee, serait chère au prix d’un tel homme. »

Il avait été le héros de la première victoire du Sud, le plus populaire peut-être de ses généraux. Il avait su obtenir une telle obéissance de ses troupes que l’ordre le plus bizarre et le plus dangereux, venant de lui, eût été exécuté avec enthousiasme. L’habitude des marches rapides, auxquelles il avait dû ses plus beaux succès, avait donné une telle célérité à ses soldats qu’on les nommait la « cavalerie pédestre » de Jackson. En lui, le général Lee perdait son bras droit, le confident de toutes ses pensées, et il allait rester seul à porter le fardeau, chaque jour plus lourd, du commandement.

Deux ans après, quand la guerre fut terminée, l’Union, si souvent vaincue par Jackson, mais fière de ses exploits, se fit gloire de le réclamer