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l’académie française sous l’ancien régime.

celui qu’il faut éviter ? Quelques-uns prétendent que c’est le peuple qui doit faire la loi ; Malherbe renvoyait ceux qui le consultaient sur la manière de bien parler aux crocheteurs du Port au foin. D’autres veulent qu’on s’en tienne aux exemples donnés par les bons auteurs : il faut n’employer que les termes et les tours dont ils ont l’habitude d’user. C’était notamment l’opinion de Chapelain,

Cet homme merveilleux dont l’esprit sans pareil
Surpassait en clarté les rayons du soleil.

Vaugelas aussi a beaucoup d’estime pour les grands écrivains de son temps ; il les a étudiés à fond et les cite avec respect ; mais il voit bien qu’ils ne sont pas assez nombreux pour qu’on puisse tirer d’eux tout ce qu’on a besoin de savoir. Le grand siècle commence à peine, les excellents écrits sont rares ; c’est donc de la parole parlée qu’on doit tirer les règles du langage plus que de la parole écrite. Malheureusement on ne parle pas partout de la même manière, surtout à cette époque. Il ne s’est pas encore formé une langue commune, qui soit celle de tous les honnêtes gens. La société française se compose de classes et de professions distinctes, qui ont chacune leur façon