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l’académie française sous l’ancien régime.

applaudir d’un public enthousiaste. Les choses allèrent si loin qu’à la fin l’autorité se fâcha, et que le chancelier Maupeou, qui ne répugnait pas aux coups de force, fut, dit-on, sur le point de supprimer l’Académie, qu’il trouvait trop républicaine. Elle ne tint pas compte de ces menaces, que le sort des parlements rendait redoutables, et ne devint pas plus réservée. Elle prit part à l’explosion de joie et d’espérance qu’amena l’avènement de Louis XVI. Son directeur, l’historien Gaillard, s’adressant au jeune roi, dans la cérémonie du sacre, lui traça presque un plan de gouvernement : « Votre cœur, lui disait-il, vous dira qu’une guerre nécessaire est un fléau, qu’une guerre inutile est un crime ; que les deux plus funestes ennemis de la religion, après l’impiété qui l’outrage, sont l’intolérance qui la ferait haïr, et la superstition qui la ferait mépriser ; qu’un roi doit à ses peuples la justice, et des juges dignes de la rendre, et des ministres nommés par la voix publique ; qu’enfin il doit aux Lettres une protection puissante, non seulement parce qu’elles font la gloire, ou même, selon Charles le Sage, la destinée des empires, mais surtout parce qu’elles fortifient les vertus en étendant les lumières. »