Page:Boissier - L’Académie française sous l’ancien régime, 1909.djvu/102

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
86
l’académie française sous l’ancien régime.

il suffit qu’il soit tiré de l’ombre ; il sera mis bientôt à sa place. Même pour les plus grands et qui se font connaître d’eux-mêmes, les honneurs académiques ne sont pas à dédaigner. Ils ont des rivaux dont ils veulent qu’on les distingue, ils connaissent les caprices de l’opinion, ils n’ignorent pas qu’il n’y a rien de plus difficile à constater que l’étendue et la solidité des réputations littéraires, que les succès du théâtre sont parfois une surprise, que la vogue d’un ouvrage, même quand elle se traduit par la vente de milliers d’exemplaires, ne dure souvent qu’une saison ; ils savent surtout qu’il est impossible de prévoir les jugements de la postérité et s’il en est, parmi les écrivains qui triomphent aujourd’hui, dont elle conservera quelque souvenir. Ces incertitudes, on le comprend bien, font le tourment d’une âme éprise de renommée ; elles expliquent le prix qu’elle attache au suffrage de quelques lettrés d’élite, qui lui paraît confirmer le succès de son œuvre dans le présent et lui permet de concevoir des espérances pour l’avenir. Il n’y a pas besoin de chercher ailleurs les raisons qui poussaient les écrivains vers l’Académie.

Quoi qu’il en soit de celles qu’allèguent Cham-