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ouvrage, et juger, s’il se peut, Octave, comme Cicéron, sur ce qu’il nous dit lui-même, sur ses aveux et ses confidences. À défaut de sa correspondance et de ses mémoires qui sont perdus, prenons la grande inscription d’Ancyre, qu’on appelle quelquefois le testament politique d’Auguste parce qu’il y résume toute sa vie. Elle nous est heureusement parvenue. On sait par Suétone qu’il avait ordonné qu’on la gravât sur des plaques d’airain devant son tombeau[1]. Il est probable qu’elle était très répandue au premier siècle de l’ère chrétienne, et que la flatterie ou la reconnaissance en avaient multiplié partout des copies, en même temps que s’étendait dans tout l’univers le culte du fondateur de l’empire. On en a retrouvé des fragments parmi les ruines d’Apollonie, et elle existe encore tout entière à Angora, l’ancienne Ancyre. Lorsque les habitants d’Ancyre élevèrent un temple à Auguste qui avait été leur bienfaiteur, ils ne crurent pas pouvoir mieux honorer sa mémoire qu’en y faisant graver ce récit, ou plutôt cette glorification de sa vie qu’il avait composée lui-même. Depuis cette époque, le monument consacré à Auguste a plus d’une fois changé de destination ; au temple grec a succédé une église, byzantine, et à l’église, une école turque. Le toit s’est effondré, entraînant avec lui les ornements du faîte, les colonnes des portiques ont disparu, et aux ruines antiques se sont joints les débris des constructions byzantines et turques, qui sont déjà des ruines aussi. Mais par un bonheur singulier les plaques de marbre qui racontent les actions d’Auguste sont restées solidement attachées à ces murailles indestructibles.

L’occasion est favorable pour étudier ce monument. M. Perret vient de nous rapporter de la Galatie une copie plus exacte du texte latin, et une partie tout à fait

  1. Suétone, Auguste, 101.