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Le vocabulaire, en effet, s’y compose de racines ou pleinement internationales, comme atom, elektr, form, teatr, adres, etc., ou du moins communes à un plus ou moins grand nombre de langues et présentant en quelque sorte le maximum d’internationalité possible. Comme les radicaux latins se retrouvent à la fois dans les langues romanes (français, espagnol, italien, etc.), et dans l’anglais, il en résulte que l’Esperanto, au point de vue du dictionnaire, est une langue aux trois quarts latine. Laissant tomber toutes les parties mortes, déclinaisons, conjugaisons, syntaxe proprement latine, etc., il a pris, pourrait-on dire, du latin cela seul qui en a survécu, ce fonds international de racines où puissent plus ou moins toutes les langues modernes du monde civilisé.

Sur 2600 racines que contient l’Universala Vortaro (Dictionnaire universel de Zamenhof) un Français en connaît d’avance près de 1500 ; s’il sait du latin, il en connaît plus de 2000 ; enfin s’il a quelque teinture du vocabulaire allemand ou anglais, il les connaît toutes, à quelques unités près.

Aussi l’étude de l’Esperanto échappe-t-elle à l’objection que l’on peut faire à toute autre langue artificielle, par exemple au volapuk ou à la langue bleue (bolak).

À quoi bon, dira-t-on, se charger la mémoire d’une langue nouvelle inconnue, qui ne réussira peut-être pas à se propager, que l’on n’aura peut-être l’occasion d’employer avec personne ? Est-il bien nécessaire d’ajouter encore une pierre à la tour de Babel, un idiome à l’innombrable multitude de ceux entre lesquels se partage le genre humain ?

À cette objection il est facile de répondre que l’Esperanto ne superpose pas une langue nouvelle aux langues déjà existantes, mais qu’il extrait seulement de ces langues tout ce qu’elles ont de commun pour en faire un idiome vraiment international. Dès lors, même dans l’hypothèse — actuellement déjà démentie par les faits — où il ne réussirait pas à se propager, ceux qui l’étudient ne perdent pas pour cela leur temps et leur peine, car il leur en restera toujours au moins la connaissance des racines empruntées par l’Esperanto aux langues autres que leurs langues maternelles.

N’en concluons pas, comme l’ont fait certains esprits malavisés, que pour apprendre l’Esperanto il faille au préalable apprendre