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Et, sans aller rêver dans le double vallon,
La colère suffit, et vaut un Apollon.
La« Tout beau, dira quelqu’un, vous entrez en furie,
« À quoi bon ces grands mots ? doucement, je vous prie :
« Ou bien montez en chaire ; et là, comme un docteur,
« Allez de vos sermons endormir l’auditeur :
« C’est là que bien ou mal on a droit de tout dire. »
LaAinsi parle un esprit qu’irrite la satire,
Qui contre ses défauts croit être en sûreté
En raillant d’un censeur la triste austérité ;
Qui fait l’homme intrépide, et, tremblant de foiblesse,
Attend pour croire en Dieu que la fièvre le presse[1] ;
Et, toujours dans l’orage au ciel levant les mains,
Dès que l’air est calmé, rit des foibles humains.
Car de penser alors qu’un Dieu tourne le monde,
Et règle les ressorts de la machine ronde.
Ou qu’il est une vie au delà du trépas,
C’est là, tout haut du moins, ce qu’il n’avouera pas.
C’Pour moi, qu’en santé même un autre monde étonne,
Qui crois l’âme immortelle, et que c’est Dieu qui tonne,
Il vaut mieux pour jamais me bannir de ce lieu,
Je me retire donc. Adieu, Paris, adieu.

  1. Allusion à des Barreaux.