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BOILIEAU.

où l’on me faisoit, en mon propre nom, dire à toute leur société les injures les plus atroces et les plus grossières. J’avoue que cela m’a donné un très-grand chagrin : car, bien que tous les gens sensés aient connu sans peine que la pièce n’étoit point de moi, et qu’il n’y ait eu que de très-petits esprits qui aient présumé que j’en pouvois être l’auteur, la vérité est pourtant que je n’ai pas regardé comme un médiocre affront de me voir soupçonné, même par des ridicules, d’avoir fait un ouvrage si ridicule.

J’ai donc cherché les moyens les plus propres pour me laver de cette infamie ; et, tout bien considéré, je n’ai point trouvé de meilleur expédient que de faire imprimer ma satire contre l'Équivoque ; parce qu’en la lisant, les moins éclairés même de ces petits esprits, ouvriroient peut-être les yeux, et verroient manifestement le peu de rapport qu’il y a de mon style, même en l’âge où je suis, au style bas et rampant de l’auteur de ce pitoyable écrit. Ajoutez à cela que je pouvois mettre à la tête de ma satire en la donnant au public un avertissement en manière de préface, où je me justifierois pleinement et tirerois tout le monde d’erreur. C’est ce que je fais aujourd’hui ; et j’espère que le peu que je viens de dire produira l’effet que je me suis proposé. Il ne me reste donc plus maintenant qu’à parler de la satire pour laquelle est fait ce discours.

Je l’ai composée par le caprice du monde le plus bizarre, et par une espèce de dépit et de colère poétique, s’il faut ainsi dire, qui me saisit à l’occasion de