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LA CONSOLATION PHILOSOPHIQUE, LH’. V. 313

flatte de concevoir ? En effet, pourraient-ils dire, les notions qui proviennent des sens ou de Viinagination ne peuvent être générales ; dès lors, ou les prétentions de la raison sont fondées, et, dans ce cas, la matière n’existe pas" ; ou bien, si elle reconnaît que la plupart de ses notions dépendent des sens et de Vimagination, ses conceptions ne sont plus que des chimères, puisqu’elle prend pour générales des notions particulières et qui dépendent des sens. A ces objections la raison ne pourrait-elle pas répondre que dans liidée générale elle ne perd pas de vue ce qui appartient aux sens et à fini agi nation, tandis que ces facultés sont incapables de siélever à liidée générale, parce que leurs notions ne peuvent dépasser la sphere des corps sensibles ; et qu’en fait de connaissances, il convient de s’en rapporter au jugement de la faculté la plus sûre et la mieux partagée ? Or, dans un tel débat, nous qui possédons la faculté de raisonner, aussi bien que celles dl imaginer et de sentir, ne donnerions-nous pas gain de cause à la raison ? Eh bienl la raison humaine n’est pas mieux fondée à dénier à l’intelligence divine la connaissance de l’avenir, par le motif que cette connaissance lui a été refusée à elle-même. Voici, en effet, ton raisonnement : « Si des événements ne doivent pas arriver d’unc manière certaine et nécessaire, on ne cc peut prévoir qu’ils arriveront nécessairement. Ils ne sont donc pas l’objet de la prescience divine, ou si nous croyons qu’ils le sont, il faudra convenir que tout arrive fatalement. » Si donc, comme nous avons la raison, nous avions aussi en partage l’intelligence divine, nous penserions que, de même que Vimagination et les sens doivent, selon nous, céder le pas à la raison, il est juste aussi que la raison reconnaisse la supériorité de V l’intelligence divine. C’est pourquoi, élevons-nous, s’il est possible, jusqu’î1 cette suprême intelligence ; à ces hauteurs, notre raison découvrira ce qu’elle ne peut