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LA CONSOLATION PHILOSOPHIQUE, LIV. IV. 237 actions ; que cette liberté de mal Faire, dont tu hâtais le terme de tous tes vœux, est de courte durée ; qu’ils sont dlautant plus malheureux qu’ils en jouissent plus longtemps, et que rien 11égalerait leur infortune s’ils en jouissaient toujours ; qu’enfin l’inxpunité qui les épargne en viola11t la justice, est un plus grand malheur pour eux que ne le serait un juste châtiment ; d’ouj’ai tiré cette conséquence qu’ils ne sont jamais si cruellement punis que lorsqu’ils semblent ne l’être pas. — Lorsque je pèse tes raisons, dis-je, elles me paraissent les meilleures du monde ; mais, si j’en reviens à l’opinion des hommes, ’ quel est celui qui consentira, je ne dis pas à les admettre, mais même à les entendre ? — Tu dis vrai, répondit-elle ; leurs yeux, accoutumés aux ténèbres, ne peuvent soutenir l’éclat de la vérité ; et ils ressemblent à ces oiseaux dont la nuit illumine le regard, tandis que le jour les. aveugle ; voilà pourquoi, moins attentifs aux lois générales de la nature qu’à leurs propres impressions, ils considèrent comme un bonheur le pouvoir de commettre le crime ou d’échapper au châtiment. Mais vois plutôt ce qui a été décrété par la loi éternelle. Conforme-toi aux principes les plus purs de la morale ; tu n’auras pas besoin de recevoir ta récompense de la main d’un juge : tu te seras adjugé toi-même le meilleur lot. Si, au contraire, tu t’abandonnes au vice, ne cherche pas ton bourreau hors de toi-même : c’est toi qui t’es précipité dans llabîme. Clest ainsi que lorsque tu regardes tour à tour la terre sordide et le ciel à l’exclusion de tout autre objet, tu crois être, selon le point de vue, tantôt dans la Fange, tantôt au milieu des astres. Le vulgaire, il est vrai, ne fait pas attention à ces choses ; mais quoi l prendrons-nous exemple sur ces malheureux que nous avons dit être semblables aux bêtes ? Et parce qu’un homme qui aurait perdu la vue et qui ne se souviendrait pas dlen avoir jamais eu llusage, se croirait pourvu de toutes.les perfections hu-