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LA CONSOLATION PHILOSOPFIIQUE, LIV. H. 91

si désirable et si éclatante à vos yeux ? Vous ne regardez donc pas, ô vils animaux, à qui vous croyez commander ? Si tu voyais une souris s’arroger l’autorité et la puissance sur toutes les autres souris, quels éclats de rire ne pousserais-tu pas ? Or, si tu songes à votre corps, que trouveras-tu de plus faible que l’homme, puisque souvent la piqûre d’une mouche chétive ou l’introduction d’un ver dans quelque organe suffit pour lui donner la mort ? Et quel pouvoir un homme peut-il exercer sur un autre homme, si l’on excepte le corpsü, et ce qui est moins que le corps, je veux dire les biens ? Pourra-t-on jamais commander à une âme libre ? Est-il possible d’ébranler la résolution d’un esprit ferme et de troubler sa sérénité ? Un tyran s’était imaginé que par la violence des supplices il contraindrait certain homme libre’“ à dénoncer les complices d’une conspiration tramée contre lui ; mais l’autre se coupa la langue avec les dents et la cracha au visage du farouche tyran. Ainsi, ces tortures que le tyran regardait comme un instrument de cruauté, furent pour le sage une occasion de vertu. Est-il dl ailleurs un traitement qu’un homme puisse infliger à un autre sans être exposé à lesubir à son tour ? D’après la tradition, Busiris, qui avait coutume d’immoler ses hôtes, fut mis à mort par Hercule son hôte. Itégulus avait jeté dans les fers un grand nombre de Cartbaginois pris à la guerre ; mais bientôt lui-même tendit les mains aux fers de ceux qu’il avait vaincus. Quelle puissance accordes-tu donc à un homme qui ne saurait faire que, tout ce qu’il peut contre un autre, un autre ne le puisse contre lui ? 4

’« Mais il y a plus : si les dignités et la puissance possédaient naturellement et en propre quelque chose de bon, elles ne tomberaient jamais en partage aux méchants. Il n’est pas de règle en effet que les contraires se recherchent. La nature répugne à une pareille alliance. Or, comme il est incontestable que d’ordinaire les dignités sont entre