Page:Bluther - Marie-Anna la Canadienne, 1913.djvu/131

Cette page a été validée par deux contributeurs.
131
MARIE-ANNA LA CANADIENNE

plus fort de la chicane, M. Gilbert nous a appelés, mon mari et moi pour les aider à paqueter leur butin ; le train partait dans une demi-heure. Il a fallu travailler comme des bêtes pour arriver en temps ; d’autant plus que M. de Villodin avait l’air d’un homme en boisson ; le pauvre garçon faisait pitié.

— Mais, cette lettre ? interrompit Henri.

— La voici, fit la femme. Elle tendit enfin une simple feuille sur laquelle étaient tracés quelques mots écrits dans la fièvre de la précipitation. Henri parvint à lire :

Le paquebot lève l’ancre demain soir et non après-demain matin comme nous avions supposé… Devons partir de suite ou manquer voyage… Écrirons de New-York… Croyez à notre…

Le reste était absolument indéchiffrable.

Pendant ce temps Marie-Anna pleurait. Sa petite chambre de jeune fille lui semblait pleine des échos de la chanson normande que Villodin avait chantée quelques jours plus tôt. Et silencieusement dans son cœur, son désespoir chantait aussi mais cette fois comme une déchirante élégie, la chanson d’adieu de son fiancé :

Je vais revoir ma Normandie
C’est le pays qui m’a donné le jour…