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et des choses de l’instruction primaire. Comment contraindre, en effet, de pauvres enfants à s’entasser pêle-mêle, à s’étioler dans une école étroite et insalubre ’ ? A quoi bon les rassembler à grand’peine autour d’un magister ignorant et grossier ? On a ca !cu !é que, pour le département du Loiret, la dépense à faire pour améliorer les maisons d’école s’élève à 1,500,000 fr. Si l’on prend ce département comme type moyen, on trouve pour l’ensemble de la France chiffre total d’environ 130 millions à répartir entre les communes, les départements et l’État et à échelonner sur une période plus ou moins longue. Il faut ajouter à cette grosse dépense, celle qui résultera, d’une part, de l’élévation indispensable du nombre et du traitement des instituteurs, et, d’autre part, de l’abaissement nécessaire dn taux de la rétribution scolaire, si l’on ne va pas jusqu’à rendre l’instruction gratuite. Ce sont de grands sacritices, mais comment s’en effrayerait-t-on, puisqu’il s’agit d’une dépense

essentiellement féconde et productive, d’un placement à gros intérêt ?

S’il est utile d’insister tout particulièrement aujourd’hui sur les avantages du principe de l’obligation, il faut rappeler en même temps les conditions dans lesquelles l’instruction primaire doit être placée pour réaliser toutes les espérances qu’elle fait concevoir. Parmi les moyens d’atteindre ce but, il faut signaler notamment 1° l’abaissement du taux de la rétribution scolaire ; 2° la formation, dans de bonnes écoles normales, d’un personnel enseignant instruit et bien rétribué ; 3" l’établissement d’écoles spéciales pour les filles ; 4° le développement des salles d’asile, des classes d’adultes et des bibliothèques populaires. 1. D’après l’article 24 de la loi du 15 mars 1850, l’enseignement primaire est donné gratuitement à tous les enfants dont les familles sont hors d’état de le payer. L’application de ce principe n’est pas toujours faite d’une manière assez large, et beaucoup d’enfants indigents restent ainsi hors de l’école. L’instruction~rendue obligatoire, il faudrait nécessairement, sinon la déclarer absolument gratuite pour tous, au moins établir une demi-gratuité correspondant à la demi-indigence. Quant au

système de la gratuité sans obligation, établi dans la plupart des États-Unis d’Amérique, dans le canton de Genève et au Chili, il peut avoir produit de bons fruits dans ces diverses contrées, mais nous inclinons à penser qu’en France son adoption augmenterait encore l’indifférence des parents qui négligent l’instruction de lenrs enfants. Cette observation faite, et la gratuité absolue écartée, il nous semble Soixante-deux instituteurs sur cent se plaignent de la situation actuelle des maison !! d’école. La plupart de nos écoles, dit nn instituteur dn Cantal sont dégoûtantes, délabrées ; ce sont des étoufToirs. Aussi quelle différence entre l’enfant de l’école et celui qui reste en plein air aux champs ! La réunion des enfants dans ces fourmilières insalubres est nne des causes de la d6générescence de la race..

If.

opportun de faire remarquer que la trop grande élévation du taux de la rétribution scolaire présente de sérieux inconvénients. Nous ne prétendons nullement contester la valeur des arguments tirés de ce qne l’homme estime davantage ce qui lui a coûté cher ; mais l’enseignement, considéré comme une denrée, n’est-il pas soumis à la loi économique, d’après laquelle ]e haut prix de l’objet en restreint la consommation

? On a constaté dans un des plus riches 

comtés de l’Angleterre, le Westridiog, où la rétribution est de 1 fr. 25 c. par mois, qu’une augmentation de 40 c. suffit pour éloigner un certain nombre d’élèves. Les parents reculent devant cette dépense, et suppriment l’éducation comme trop onéreuse. Le Français diffèret-il à cet égard de l’Anglais ? En France, on a pu constater à certaines époques que le nombre des élèves payants avait augmenté et qu’en même temps le produit de la rétribution scolaire s’était accru, mais ii reste à rechercher si cet accroissement dont quelques personnes font honneur à l’élévation du taux de la rétribution, ne s’est pas accompli au contraire malgré cette élévation et si la durée moyenne du séjour à l’écoIen’apasdiminué.ONigédepayer 1 fr.50c. ou même 2 fr. par mois, somme à laquelle s’ajoute le prix des livres et des fournitures de classe, beaucoup de paysans trouvent l’instruction trop chère, surtout quand ils ont plusieurs enfants. C’est parmi eux un sujet de murmures et de plaintes quelquefois très-vives. Aussi la loi du 10 avril 1867 a-t-elle étendu l’application du principe de la gratuité.

. L’aptitude de l’instituteur à remplir sanoble mission ne peut résulter que d’une préparation à la fois théorique et pratique. Les écoles normales répondent à ce besoin ; c’est là qu’en Allemagne, en Suisse et ailleurs se forment des instituteurs d’élite. Il est possible de combiner l’action de l’école normale avec deux stages l’on, antérieur à l’admission, aurait lieu de quinze à dix-huit ans et ferait de l’aspirant placé dans une bonne école un moniteur semblable aux~Mpï~eac~e~ de l’Angleterre ; l’autre stage commencerait après la sortie de l’école normale ; avant de devenir instituteur titulaire, le jeune maître breveté remplirait, pendant un temps suffisant, les fonctions de maître adjoint. < On doit poursuivre l’améUoratioB et l’extension des écoles normales primaires. Si l’on veut de bons instituteurs préparés par des études complètes, il faut abandonner le régime défectueux qui consiste, pour quelques localités, à placer des élèves stagiaires dans les écoles désignées par le conseil départemental. Cet expédient, autorisé par la loi du 15 mars 1850, est condamné par l’expérience Dans le duché de Bade et le royaume de Wurtemberg, le séjour à l’école normale est obligatoire pour quiconque aspire à être instituteur commnnal. On peut affirmer d’une manière générale que l’instruction de nos instituteurs primaires français n’est pas s-ufflsante.

..EcpM~ de !o situation de fempire, 1863.