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s’engouffrer dans le grand infini, comme les fleuves dans l’océan. Qu’on ne se récrie point contre ces globes tombant de la plume par milliards. Il ne faut pas dire ici : Où trouver de la place pour tant de monde ? Mais, où trouver des mondes pour tant de place ? On peut milliarder sans scrupule avec l’infini, il demandera toujours son reste.

Les doctrines, qui ont parfois le mot pour rire aussi bien que pour pleurer, railleront peut-être nos infinis partiels, en nous félicitant de faire tant de monnaie avec une pièce fausse. En effet, quand un infini unique est dénié à l’étendue, lui en adjuger des millions, le procédé semble sans gêne. Rien de plus simple cependant. L’espace étant sans limites, on peut lui prêter toutes les figures, précisément parce qu’il n’en a aucune. Tout à l’heure sphère, le voici maintenant cylindre.

Que neuf traits de scie partagent en dix planches, perpendiculairement à son axe, un bloc de bois cylindrique. Que, par la pensée, on étende à l’infini le périmètre circulaire de chacune de ces planches. Qu’on les écarte aussi, par la pensée, les unes des autres de quelques quatrillions de quatrillions de lieues. Voilà dix infinis partiels irréprochables quoique un peu maigres. Tous les astres, issus de nos calculs, tiendraient à l’aise, avec leurs domaines respectifs, dans chacun de ces compartiments. De plus, rien n’empêche d’en juxtaposer d’autres, et d’ajouter ainsi de l’infini à discrétion.

Il est bien entendu que ces astres ne restent point parqués en catégories par identités. Les conflagrations rénovatrices les fusionnent et les mêlent sans cesse. Un système solaire ne renaît point, comme le phénix, de sa propre combustion, qui contribue, au contraire, à former des combinaisons différentes. Il prend sa revanche ailleurs, réenfanté par d’autres volatilisations. Les matériaux se trouvant par-