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au milieu de ses opérations commencées, seront-ce les cardeurs, les fileurs, les contre-maîtres même qui feront marcher l’établissement ? Faute d’un ouvrier, de dix ouvriers la filature n’arrêtait pas ; la mort de son chef immobilise les métiers, arrête le piston de la machine. Puisque les résultats sont différents, il y a donc inégalité de capacité entre le chef d’industrie et ses ouvriers ; l’un est donc plus utile que l’autre. Et si cela est, souffrez donc que, comme le capitaine du navire, son traitement soit plus élevé que celui de tous les autres.

Il est vrai que parfois l’entrepreneur abuse de sa position, pour élever son traitement aux dépens du salaire des travailleurs : mais cet abus n’est pas une conséquence inévitable de la richesse, mais la faute des hommes, faute qu’il est possible d’éviter. Adam Smith l’a dit : le salut est dans le travail, chacun est le fils de ses œuvres.

Frappé de cette idée, émise par Godwin, son compatriote, que, dans l’organisation actuelle de l’industrie, les chefs se récompensaient trop, Robert Owen, économiste et philantrope anglais[1], voulut employer au soulagement de la classe ouvrière, dont il était sorti, une fortune considérable qu’il avait acquise par son travail. Il conçut l’idée d’une vaste association industrielle, dans laquelle personne ne serait exploité, et où chacun, commandant à son tour, recevrait une part égale dans les profits du travail commun. Prodigue, pour faire le bien, d’une fortune labo-

  1. Ce fut lui qui fonda les premières salles d’asile pour enfants.