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domaine de la politique, et l’on ne vint jamais à bout de la résoudre. Elle vaut pourtant bien le peine d’être examinée, et il n’est pas inutile de savoir lequel de ces deux hommes a raison. L’un dit aux infortunés : Allez-vous en ; vous êtes de trop ici ; il n’y a pas de couvert pour vous : et l’autre répond : S’il y a des pauvres, c’est qu’il y a des riches qui mangent pour deux[1]. Une pareille étude est d’autant plus nécessaire, que les luttes ne sont pas exclusivement bornées à l’Angleterre. Après la réfutation de Malthus par Godwin, je vous recommande les écrits de l’américain Everett, qui a soutenu, comme Mirabeau (qui s’est, il est vrai, dédit plus tard), que la population est un des symptômes de la richesse, et que plus un pays est peuplé, plus il est prospère.

La question sortit alors tout-à-fait du domaine

  1. On ne lira pas sans intérêt l’extrait suivant de Godwin, pour l’opposer aux paroles de Malthus citées par le professeur.

    Ce qui frapperait d’abord celui qui jeterait un coup d’œil sur tous les royaumes de la terre, » et sur l’état de leur population, ce serait le très-petit nombre de leurs habitants et la multitude et l’étendue des terrains incultes et déserts. Si son cœur était plein d’une douce affection pour les hommes, il ne pourrait pas s’empêcher de comparer l’état présent du globe, avec son état possible ; il ne pourrait envisager l’espèce humaine que comme un faible débris répandu sur une immense surface fertile et productive, et il s’affligerait en voyant combien peu on met à profit les qualités bienfaisantes de la terre, notre mère commune. Si au lieu d’être sensible et enthousiaste, il était d’un caractère posé et réfléchi, peut-être ne s’affligerait-il pas, mais je crois qu’il chercherait sérieusement à connaître comment on peut accroître la population des États, et par quels moyens les différentes régions du globe pourraient se remplir d’une nombreuse race d’habitants heureux.

    Mais ce n’est point la loi de la nature, ce n’est que la loi d’un état social très-factice, qui entasse sur une poignée d’individus, une si énorme surabondance, qui leur prodigue les moyens de se livrer à toutes les folles dépenses, à toutes les jouissances de luxe, tandis que d’autres, qui souvent les valent bien, sont condamnés à languir dans le besoin. »