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Dans une assemblée nombreuse et ardente qui se tint à Munzingen, le major Clias ayant parlé de solliciter le renvoi du duc de Montebello, sa voix fut couverte par une immense clameur d’approbation et d’enthousiasme. À Flawil, canton de St-Gall, un orateur populaire, M. Hume, avait déjà fait entendre des accents dignes d’être répétés par tous les échos de la Suisse. À Viedikon, près Zurich, vingt-mille hommes s’étant donné rendez-vous sur le vaste emplacement du tir fédéral, et du haut d’une tribune décorée par les drapeaux pris dans les guerres de Bourgogne, M. Zehnder s’étant écrié : « Êtes-vous décidés tous à repousser, au prix de votre sang, une agression injuste, » —Oui, oui, répondirent avec force les vingt mille voix ; et une adresse fut votée à la Diète, gardienne de l’indépendance et des droits de la patrie.

Mais la Diète ne devait pas répondre à l’élan populaire, dominée qu’elle était par une prudence sans élévation. Une commission avait été nommée, qui semblait hésiter entre l’honneur et la peur. Ce fut alors que M. Thiers écrivit au duc de Montebello une lettre dans laquelle il déclarait que, si les conclusions adoptées n’étaient point satisfaisantes, la Suisse serait immédiatement bloquée. C’était proclamer comme un droit l’abus de la force, c’était combler la mesure des outrages. Et cependant, la peur eut pour elle la majorité. Le projet de conclusum présenté à ta Diète par la commission portait qu’une police centrale serait établie ; que l’obligation d’expulser les réfugiés qui, par des faits constatés, auraient compromis les rapports internationaux de la Suisse,