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pour le pousser dans les bras de l’Allemagne, un peuple dont il lui importait à un si haut degré de conserver les sympathies.

Le gouvernement français commença donc à élever des plaintes sur la conduite des réfugiés que la Suisse avait recueillis, sur l’abus qu’ils faisaient du droit d’asile, sur leurs relations ténébreuses avec les conspirateurs de Paris.

Or, rien de plus injuste que ces accusations, du moins en ce qui concernait la France. Car, loin de s’entendre avec la Haute Vente Universelle, siégeant à Paris, les principaux membres de l’association dite la Jeune Europe la dénonçaient comme le plus dangereux de tous les pouvoirs occultes. Ils lui reprochaient de rêver l’unité absolue de l’Europe, de prétendre à la confiscation des droits de tous au profit d’un seul peup !e, la France, et même d’une seule ville, Paris ; ils lui reprochaient d’avoir conçu l’audacieux et tyrannique dessein d’ériger au milieu du 19e siècle une papauté républicaine tout aussi dévorante que la monarchie universelle convoitée jadis par Charles-Quint et Philippe II. Et comment nier que tel lut le but de la Haute Vente Universelle ? Ses théories de centralisation sa physionomie dictatoriale, le secret redoutable dont son noyau suprême restait enveloppé, l’art avec lequel elle avait morcelé, fractionné les forces révolutionnaires des divers pays, de manière à ce qu’elles ne pussent jamais se concerter contre une mesure qui leur aurait paru funeste ou oppressive, en fallait-il davantage pour trahir les projets de ceux qui aspiraient à gouverner, de Paris, l’Europe