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craignait-il ? Que son influence ne fut trop petite dans le Conseil s’il n’avait que le portefeuille de l’instruction publique ? Mais l’importance d’un ministre résulte moins de sa place dans la hiérarchie ministérielle que de sa valeur personnelle et de son talent. M. Guizot, simple ministre de l’instruction publique, cesserait-il pour cela d’être aux yeux du public un des hommes les plus considérables du Cabinet ? Moins que personne il devait être retenu par cette crainte, lui qui avait déjà occupé le poste qu’on lui offrait maintenant, et qui l’avait occupé de façon à attirer sur lui tous les regards. Si on lui refusait le ministère de l’Intérieur, ce n’était nullement pour l’offenser. Mais était-il juste d’exiger des amis si nombreux de M. Thiers et de M. Barrot, qu’ils fissent le sacrifice du Conseil d’État, des préfectures, des sous-préfectures, des emplois vraiment politiques, au chef du parti doctrinaire, parti qui, dans la Chambre, ne comptait pas plus de trente membres, et qui ne tenait, au dehors, d’autre place que celle de son ancienne impopularité ?

À ces considérations, développées par M. Chambolle avec convenance et dignité, M. Guizot répondit par une proposition fort embarrassante pour ses adversaires. « Si M. Odilon Barrot, dit-il, veut pour lui le ministère de l’intérieur, je le lui cède, à condition qu’on me donnera la présidence de la Chambre. Est-ce trop exiger ? La coalition a eu trois chefs, et j’en suis un : il y a trois grandes positions à occuper, et je ne demande que celle dont MM. Barrot et Thiers ne voudront pas. Quoi de plus légitime ? »