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se révoltait à la seule idée d’affaiblir l’attaque. Précipité vers les extrêmes par l’excès du ressentiment, et arrivé à ce point d’exaltation qu’il ne savait plus se modérer, même pour réussir, il combattit l’opinion de M. Thiers, mais sans l’emporter. Il se désolait, lorsque, pensant tout-à-coup à M. Odilon Barrot : « M. Barrot, dit-il, est notre allié. Changer le texte convenu sans en conférer avec lui est absolument impossible. » L’observation était juste : on dut se décider à consulter le chef de la Gauche. Et M. Guizot allait se félicitant de son heureuse inspiration, car il tenait pour certain que M. Barrot n’oserait pas se montrer plus monarchique que lui. Il en fut autrement. Interrogé, M. Barrot n’hésita pas à se prononcer pour une rédaction moins âpre, moins menaçante. On convint, en conséquence, d’un amendement que M. Billault devait présenter le lendemain et qui devait être adopté par la commission. Mais, dans la soirée, M. Odilon Barrot ayant raconté à ses amis ce qui venait de se passer et s’étant vu désapprouvé par eux, le projet d’amendement fut abandonné, et l’on attaqua les usurpations de la prérogative royale aussi péremptoirement que M. Guizot le désirait.

Du reste, les appréhensions de M. Thiers ne devaient pas se réaliser. Au vote définitif, 221 voix adoptèrent l’adresse modifiée. Quant à l’adresse rédigée par la commission, elle eut pour elle 208 voix, et, dans le nombre, celle du marquis de Dalmatie, fils du maréchal Soult, celle de son gendre, M. de Mornay, celles enfin des deux frères de Casimir Perier. Le ministère se sentit perdu. Mais le