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C’était là un glorieux, un brillant fait d’armes, et le prince de Joinville y avait pris une part aussi active qu’honorable. Mais, loin d’en attribuer le mérite au ministère, les coalisés lui reprochèrent de n’avoir pas adopté plus tôt le système de la vigueur ; et faisant le compte des malheureux qu’étaient venus frapper sur l’escadre de blocus le Vomito et la nèvre jaune, ils accusèrent hautement le Cabinet d’avoir retardé le triomphe pour en répandre sur la discussion de l’adresse l’influence et l’éclat.

Ce fut le 7 janvier 1839 que commença la lutte si impatiemment attendue. Et jamais il n’y en eut de plus animée. Deux hommes y figurèrent en première ligne, M. Thiers et M. Guizot : l’un brillant et ingénieux, infatigable et hardi ; l’autre froidement hostile, provocateur, violent dans sa gravité, et ne laissant percer dans sa parole qu’une partie des colères que contenaient son regard, son geste, la fatigue de ses traits et sa lèvre haineuse. Qui les eût dit alliés, ces deux hommes ? Et jusque dans le fond de leurs discours, quelle diversité ! Car, ce que M. Guizot, à l’entendre, ne pouvait pardonner aux ministres, c’était d’avoir décrié la vieille politique, avili le commandement, rempli toute chose d’anar.chie, et, en penchant tour-à-tour à gauche et à droite, rendu les anciennes amitiés défiantes, les alliances incertaines. Selon M. Thiers, au contraire, la faute était de n’avoir donné l’amnistie que le lendemain d’un échec, de n’avoir pas su discerner l’heure précise à laquelle la cause de l’ordre devenait moins nécessaire à défendre que celle de la liberté, et d’avoir par là dépassé le but, à l’exemple de la