Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/332

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Par l’augmentation du capital, criaient à M. Laffitte les gens de Cour, vous prétendez offrir aux rentiers une compensation ? Mais, pour qu’ils en pussent profiter, il faudrait qu’ils vendissent leurs rentes. Or, les vrais rentiers sont les pauvres gens qui n’ont cherché dans la rente que le repos, et qui vivent les yeux constamment fixés sur le revenu. À qui donc profitera cette augmentation de capital dont vous nous vantez les avantages ? Aux rentiers de passage, à ceux qui vendent des rentes et qui en achètent pour les revendre, à des spéculateurs enfin, race impure qu’on ne saurait favoriser sans honte et sans péril. »

À quoi les disciples de M. Laffitte répondaient : « Qu’il y avait injustice et mauvaise foi à confondre avec l’agiotage le profit tiré de l’augmentation du capital ; que la majorité des vrais rentiers, des rentiers sérieux, se composait d’hommes qui étaient entrés dans la rente, non pour s’y bercer dans une paresse sans fin, mais pour y attendre l’occasion de retrouver leur capital, quand le moment serait venu pour eux, soit d’établir leurs fils, soit de marier leurs filles, soit d’exploiter quelque idée utile ; que c’était à ceux-là que l’augmentation de capital profiterait et qu’à ceux-là surtout une compensation devait être offerte, puisqu’ils étaient, et les plus pauvres, n’ayant point un revenu assez considérable pour s’en contenter, et les plus dignes d’intérêt, n’ayant point renoncé à servir la société. »

Grande fut l’agitation produite par une querelle qui mettait aux prises tant de passions et tant d’intérêts. Étourdie du choc des systèmes, la Chambre