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lui étaient dévoués. Se séparer d’un domestique était pour lui une peine si vive qu’il ne s’y pouvait résoudre. Il aima, il eut des amis.

N’importe. À qui touche aux destinées des peuples il faut plus qu’une certaine disposition à compatir aux souffrances individuelles. L’existence politique de M. de Talleyrand ne fut qu’un long scandale : il est juste, il est nécessaire qu’on la flétrisse. Par lui fut couvée, en effet, l’immoralité contemporaine, qui à son tour le soutint et le porta. À son école se formèrent les philosophes de boudoir qu’on a vus depuis prendre le cynisme pour une preuve de supériorité et la corruption pour de l’esprit, plagiaires du vice heureux, malhonnêtes gens à la suite.

Mais, grâce au ciel, il n’est pas vrai que l’intelligence soit du parti de l’improbité. M. de Talleyrand, nous le répétons, et la vérité l’exige M. de Talleyrand fut un homme médiocre. M. d’Hautérive eut le mérite des travaux diplomatiques dont il usurpa, lui, tout l’honneur. Les traités sur lesquels on lit sa signature en qualité de serviteur de Napoléon, l’épée de son maître les avait conclus. Repoussé par l’Empereur après l’avoir été par la République, il ne prévit pas le retour des Bourbons, et ne le jugea possible que lorsqu’ils entrèrent dans Paris. Les Cent-Jours prirent au dépourvu sa prévoyance, si follement vantée ! Au congrès de Vienne, et bien que le partage des dépouilles du monde eût fait naître entre les Puissances victorieuses des dissidences dont un négociateur habile pouvait aisément tirer profit, il ne sut empêcher ni la formation du royaume des Pays-Bas, qui devait nous servir