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Ils demandaient de quel droit on confiner dans le ministère de l’instruction publique, position évidemment secondaire, un homme aussi considérable que M. Guizot par son crédit sur les Chambres, par son talent, pas sa passion… et ils auraient pu ajouter : par la place qu’il occupait dans les haines. C’était donc pour lui qu’ils réclamaient le ministère de l’intérieur, poste aussi bon à occuper que difficile à défendre. M. Duvergier de l’Hauranne s’en ouvrit librement à M. Molé dans un entretien qu’ils eurent un jour ensemble au jardin des Tuileries. Mais celui-ci bien résolu à ne pas céder. Et l’importance qu’il attachait à ces vaines querelles d’amour-propre était si grande qu’en racontant sa conversation avec M. Duvergier à un de ses confidents, il s’échappa jusqu’à cette exclamation : « L’Europe a les yeux sur nous ; elle veut savoir qui l’emportera de M. Guizot ou de moi. » De sorte que, dans un pays où des hommes avaient paru sur la scène, vers la fin du dernier siècle, gouvernant au milieu des plus effroyables périls, dans l’unique intérêt d’une moitié du monde asservie par l’autre, et sans soucis de leur repos, de leur vie, de leur mémoire, tant il y avait en leur abnégation de profondeur et d’héroïsme !… dans ce même pays, misérablement affaissé sous le régime constitutionnel, la vie publique n’était plus qu’un jeu d’enfant et le pouvoir qu’une intrigue !

Pour compléter l’enseignement, remarquons que la rivalité des chefs les rendant esclaves des infé-