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coup de la mort ? Ne comprenez-vous pas que son supplice sera augmenté, sera doublé ?… Mais j’aperçois quelque chose de plus terrible encore dans ces deux procès qui se font séparément. Si les accusés du conseil de guerre sont condamnés, l’accusateur public se présentera au jury, leur tête à la main, en quelque sorte, pour demander la tête des autres !… » S’élevant à des considérations plus générales l’orateur ajoutait « Votre loi détruit le sentiment qui lait le bon soldat, ce sentiment qui dit au soldat qu’il est citoyen. Ce qui rattache le soldat au pays, c’est qu’il pense à la maison de son père, à son champ, au cimetière qui a reçu les cendres de ses aïeux et doit recevoir les siennes. C’est tout ce qui tient à sa petite patrie qui lui rend la grande chère. Les bons citoyens font les bons soldats… La justice est une en France, disait Napoléon on est citoyen avant d’être soldat. (Vous l’entendez… Napoléon ! Voilà sa pensée). Il faut que les délits du soldat soient soumis à la justice civile. Oui, cela doit être ainsi, sauf à l’armée, car l’armée emporte tout avec elle, c’est l’État qui voyage… Un autre point capital, c’est qu’il ne faut pas que la tutelle de la société soit abdiquée par elle-même. Eh quoi ! quand un crime à la répression duquel tout l’État et est intéressé aura été commis, ce ne sera plus la société qui aura le droit de répression Or, le jury, c’est la société même… Si vous faites de l’armée un corps comme autrefois le clergé ; si, après lui avoir mis les armes à la main vous l’investissez du droit de rendre la justice sous les