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des villages pillés, d’épouvantables vengeances, des incendies, des égorgements. La vieille mère de Cabrera fusillée à Tortose, et aussitôt après vengée parle meurtre de vingt-quatre femmes que Cabrera fit fusiller à son tour, que faut-il de plus pour caractériser la lutte au sein de laquelle se débattait, meurtrie et désespérée, une brave, une malheureuse nation ? Encore si l’arène avait été circonscrite Mais aux excès du brigandage armé qui pesait sur les campagnes, l’émeute répondait, du fond des villes, par des hurlements sauvages et d’affreux holocaustes. Pour soulever la multitude, il suffisait souvent d’un cri mort aux carlistes ! Et à Barcelone, par exemple, on avait vu le peuple, dans la nuit du 4 janvier 1836, courir, à la lueur des torches, vers la citadelle, l’escalader, massacrer cent vingt prisonniers carlistes, et lancer du haut des remparts le colonel O’Donnell, dont le cadavre, traîné dans les rues au bout d’une corde, fut enfin brûlé sur la place publique au milieu des rugissements d’une foule en délire.

Comment couper court à tant d’horreurs ? Comment sortir de la lice ensanglantée dans laquelle l’Espagne tournait depuis si long-temps ? Pour ceux que n’effrayait pas l’importation des idées contre-révolutionnaires mûries à la Cour de France, la question n’était pas douteuse, et ils invoquaient l’intervention à grands cris. Mais, sur ce point, M. Mendizabal n’était pas homme à fléchir. Tout ce qu’il s’était décidé à vouloir, c’était le système de translimitation, destiné uniquement à priver don Carlos des secours que les Puissances du Nord lui