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capitale, touchant à tous les principes qui servent de base au crédit. Et cependant, c’était contre le gré de ses collègues, sans les avoir consultés, sans les avoir avertis, que M. Humann venait poser un problème de ce genre devant la Chambre et devant la France ! Jamais on ne vit un pareil coup de théâtre. Particulièrement blessé dans ses droits de président du Conseil, M. de Broglie était indigné. Le fait est que les collègues de M. Humann s’attendaient si peu à sa déclaration, qu’au moment où les députés entraient en séance, M. Fould ayant demandé au garde-des-sceaux s’il serait question de la réduction de l’intérêt dans l’exposé des motifs du budget, M. Persil avait répondu très-sincèrement et très-péremptoirement par la négative. Mais combien ne fut pas plus amère et plus profonde l’humiliation des ministres, quand M. Augustin Giraud annonça qu’il se proposait de leur adresser, dans la séance du 18 janvier, des interpellations formelles ; car, quels motifs pouvaient empêcher la présentation officielle d’une mesure que le ministre des finances jugeait si utile et si opportune ?

Aux interpellations dont ils étaient menacés, les collègues du ministre des finances avaient à répondre, avant tout, par le renvoi de M. Humann : ils résolurent de le sacrifier. M. Thiers, néanmoins, penchait pour une réconciliation, et même il essaya de la négocier ; mais outre que la conduite de M. Humann, à l’égard du Cabinet dont il faisait partie, était réellement digne de blâme, il fallait une victime au ressentiment des doctrinaires, hommes orgueilleux par essence et implacables. Un bal que M. de Broglie donna sur ces entrefaites ne servit