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l’appartement. Girard, d’après les informations prises, habitait la maison depuis quelques mois. Il se donnait pour mécanicien. Jamais la concierge n’était entrée chez lui : il n’y avait reçu qu’un homme, qu’il faisait passer pour son oncle, et trois femmes qu’il disait ses maîtresses. Le 28 juillet, on l’avait vu aller et venir, monter et descendre, dans un état manifeste d’agitation, et il était entré dans un café voisin pour y boire, contre son habitude, un petit verre d’eau-de-vie. Au corps-de-garde où on l’avait conduit après son arrestation, un garde national lui ayant demandé : « Qui êtes-vous ? — Cela ne vous regarde pas, avait-il répondu avec assurance : je le dirai quand je serai interrogé. » Il portait sur lui de la poudre interrogé sur l’usage qu’il en voulait faire, il dit : Pour la gloire. Plus tard, à l’époque de son procès, nous ferons connaître ce misérable, dont le véritable nom était Fieschi, et nous dirons les manœuvres à jamais honteuses qui furent pratiquées pour lui arracher des aveux. Nous n’arriverons, hélas ! que trop tôt à des détails que nous ne pourrons transcrire sans que le rouge nous monte au front !

Tout Paris connaissait déjà les malheurs de la journée, et la consternation qu’ils y avisent répandue est plus facile à concevoir qu’à décrire. L’affliction était universelle, profonde, et, chez quelques-uns, mêlée d’effroi. Sur les places, dans les rues, on ne s’abordait que par des questions sinistres. Que signifiait cette rage aveugle ? Comment un aussi exécrable forfait avait-il été possible dans un pays qui était la France ? Et l’on disait le nombre des victimes, combien elles différaient par l’âge,