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un commis de la maison, auquel Boireau avait fait confidence de cette visite, disait à son père, en parlant de la revue du lendemain : « Vous n’irez pas si vous m’en croyez. » Les soupçons qu’éveillaient de telles paroles parviennent, comme renseignement, au commissaire de police de la Chaussée-d’Antin, M. Dyonnet ; mais, outre que l’indication était très-vague, la fatalité ne permit pas qu’on mît la main sur l’homme qui seul pouvait donner le mot de cette redoutable énigme.

Le soleil du 28 se leva sur la ville, effrayée déjà par de sourdes rumeurs et comme oppressée. Vainement le tambour avait-il appelé, de grand matin, la garde nationale sous les armes. On remarquait partout une sorte d’apathie où entrait quelque défiance. Vers dix heures, les légions s’étendaient sur une ligne immense, le long des boulevards, fanant face à quarante mille soldats, fantassins ou cavaliers. Le boulevard du Temple ayant été désigné, dans les rumeurs étranges dont nous avons parlé, comme le théâtre du crime prévu, des agents de police avaient reçu ordre de longer les maisons et de surveiller les fenêtres. Il paraît même que, la veille, M. Thiers avait fait fouiller, de ce côté, un assez grand nombre de maisons ; mais les réclamations des habitants du quartier s’étaient produites avec tant de violence, qu’il avait fallu abandonner les perquisitions commencées.

L’horloge du château marquait dix heures, lorsque le roi sortit à cheval des Tuileries. Il était accompagné de ses fils : les ducs d’Orléans, de Nemours et de Joinville ; des maréchaux Mortier et Lobau, des ministres, et d’une foule nombreuse de géné-